Dans le cadre du projet « la commande » qui a pour objet « le travail » et suite aux discussions et recherches que nous avons conjointement menées, nous décidons, à trois, de développer un projet sur ce thème.
L'idée se dessine derrière une phrase — Et d'ailleurs, le travail ne mériterait-il pas une carte postale ? — qui sonne comme une synthèse de notre démarche. En effet, nous nous proposons de concevoir des cartes postales. Ces cartes postales ont cependant un usage propre, celui d'être distribuées sur le lieu de travail. On peut ainsi imaginer un insolite présentoir, disposé au cœur de l'entreprise, destiné aux travailleurs de la société afin qu'ils puissent saisir les cartes, pour écrire depuis leur travail.
Au delà du simple effet d'annonce, il nous faudra mettre en œuvre ce dispositif. C'est pourquoi il nous est nécessaire de définir un premier mode d'emploi. L'origine et l'objectif du projet ne se situe pas dans une relation avec une société, en un lieu, mais s'envisage comme un processus qui vient se placer dans une ou plusieurs mise-en-œuvre. C'est donc pour ces raisons qu'il nous faut définir un protocole, premier mode-d'emploi. Celui-ci nous permet d'abord de rentrer en contact avec une entreprise. Il permet ensuite de définir les contraintes d'applications régionales. Ce protocole est évidement à négocier avec l'entreprise.
Reprenons donc ensemble l'idée à la base.
Notre objectif est d'introduire la carte postale — élément étranger — dans un corps professionnel. Nous visons ainsi à désorienter ce corpus de personnes de ses habitudes afin de les amener, et aussi de nous amener, à des échanges singuliers et différents sur le travail. Ces cartes postales afficheront, sur leur face, des photographies de l'entreprise. Ces images se dessinent comme paysages de l'entreprise. Les clichés auront été pris par nos soins, in situ, et dans le sens de notre objectif. Nous considérons notre position, à la prise de vue, comme artificielle, surfaite et étrangère. Dans cette étrange optique du paysage de l'entreprise (du local, du lieu), nous ne pouvions ignorer l'autre paysage de l'entreprise (des travailleurs, des corps).
Avant d'avoir pu prendre un premier cliché, il nous faut rappeler que notre projet contient cette part interrogative qui permet une évolution de notre pratique, particulièrement en fonction des diverses contraintes liées aux ressources humaines. Nous pouvons en effet anticiper les conflits qu'implique le portrait. C'est d'ailleurs ce soucis qui nous amène à penser l'importance du traitement des images des travailleurs à l'œuvre. C'est pourquoi, avant la première prise, et dans l'objectif d'un échange ul
térieur, nous pensons obligatoire de ne pas montrer d'espace vide de l'entreprise, vides humains. C'est à notre humble avis un moyen de mettre en bonne condition l'échange. Il est clair que cette présence humaine en l'image conduira aux questions que nous soulevons dans notre démarche. Quelle est la question de l'homme au travail ? Ou bien même, et si il faut la poser, et-ce-que la question au travail se pose ? Et comment se poserait-elle ? — Comme une carte postale, pas seulement dans le labeur, mais dans l'enthousiasme d'un ailleurs.